Une goutte d’eau dans l’océan de l’ingratitude des hommes

26 mars 2014

Une goutte d’eau dans l’océan de l’ingratitude des hommes

ob_321b81ee6cc00b970b497f367bddfbbe_45925

On croit toujours que c’est le premier amour, surtout adolescent. A chaque fois c’est comme la naissance d’une nation. Comme une virgule mal placée qui change le cour d’une phrase et qui vous ouvre les yeux sur la réelle puissance des mots, la réelle puissance de la vie.

– » On se connait ! »

-« Non ».

-« Maintenant si.  »

C’est d’un mauvais, mais d’un mauvais et pourtant elle répond.

Merci de tolérer les heures qui viennent où je vais déblatérer inepties sur conneries, mais promis je le ferai avec humour.

Elle est belle, pleine de féminité et chacun de ses sourires est une nouvelle victoire.

On commence par les traditionnelles questions :

Première question : « Tu es marocain ? »

Deuxième question : « Tu es né ici … ? 🙂 ». Classique de chez classique.

Par l’affirmative à deux reprises, nous entamons donc cette parade qui nous plonge le temps qui nous est accordé dans la dimension planète love ou même la cheminée de la déchetterie de Bruxelles a un certain charme.

Il fait beau cet hiver, j’ai 18 ans et je crois que je vais découvrir l’amour.

Au bout de 15 minutes, je veux être son essentiel, sa moitié, son tout.

Elle adore rire, du coup je la fais rire comme pour nous évader.

Comment ai-je fait pour vivre sans elle ?

Notre discussion pouvait débuter :

« -Tu pries ? »

« -Non. »

« Moi, mon mari sera un bon musulman. »

« -????? »

-Euh je te le souhaite.

-C’est quoi un bon musulman?

-C’est quelqu’un de bien, qui craint Dieu, qui prie et qui a la foi …

2 jours après c’était fini.

-« Tezzzz ».

Pas assez musulman peut-être mais surtout pas de voiture pour la faire vraiment rêver.

Elle finira par se marier avec un belge qui a du se convertir et s’est fait circoncire à 26 ans. Au moins il y a une justice …

Malgré cette circoncision post-maturée, sa famille à elle, ne l’acceptera jamais.

Alors pourquoi en arriver à cette négation de soi ?

Pourquoi imposer à l’autre ce que nous refuserons qu’il nous impose !

Qui a raison, qui veut avoir raison, qui croit avoir raison ?!

« Critiquer n’est pas condamner, c’est comprendre la réaction qu’adopte l’autre là où vous auriez réagi autrement. »

Moi je la veux marocaine, Kholota qui se lache (Kholoto ou Kholota est le terme attribué aux belges d’origine marocaine à l’instar des beurs en France). Qui trouve le bon milieu, l’alchimie parfaite entre terroir culturel, humanisme, ouverture d’esprit et grâce sensuelle. Qui les manie avec classe et fierté comme une danseuse de flamenco.

Je veux qu’elle soit parfaite sans se soucier si moi je le suis. « Clairement macho ».

Mais il y a cette part de machisme justement dosé avec lesquelles composent les méditerranéennes. Une sorte de pacte tacite entre la femme et l’homme qui trouve ses limites dans un cadre fixé par ces Dames et heureusement. Conscientes qu’à l’abri de tous, elles tolèrent maternellement que nous leur versions le soir, dans leur robe, des larmes d’enfant roi.

Nous restons des enfants en qui elles croient.

Elles font de nous des hommes et parfois au détriment de leur propre féminité.

Femmes, nous savons qui vous êtes et c’est aussi pour ça que nous vous aimons.

Et ici c’est pareil, c’est juste qu’on est trop à l’étroit. On a besoin d’air, de sortir le ghetto de notre cerveau. Et c’est souvent une femme qui nous donne la force et le courage de le faire.

Et puis il y a elle …

Elle est joliment marocaine, les yeux clairs, des petites taches de rousseur, un teint naturellement ensoleillé. Une douceur dans ses mots, un regard envoutant.

Elle sait qui je suis, comment et pourquoi.

Patiente, à chaque fois au coin de la rue c’est elle qui me regarde, je la regarde une seconde.

« Waw… »

Je suis trop timide pour faire le premier pas, trop con aussi.

Les mecs du quartier sont insensibles à cette suavité, mais moi je sais.

Des fois je la croisais devant la porte, raclette à la main le pantalon légèrement remonté, je la regardais nettoyer et c’est beau. C’est elle !

Voir une femme qui nettoie, ça plait à beaucoup d’hommes, c’est universel, voir une femme qui nettoie toutes connotations machistes à part, c’est un foyer rassurant, voir une femme qui nettoie ça me replonge encore dans ce statut d’enfant.

Je la trouvais belle au naturel et elle le savait.

« Pourquoi tu ne viens pas me parler » me dit-elle ?

Et là, le con dans toute sa splendeur lui répond :

« Qu’es ce que t’as … j’ai rien à te dire ».

Voilà ce que l’adolescent post-pubère a répondu face à celle qui le rendait dingue depuis des années.

Le con … Depuis, je recherche celle qui comme elle me fera swinguer les intestins.

Car j’aime cette féminité, au parfum de fleur d’oranger, au sourire radieux d’un doux matin.

Je veux que chez moi, ça sente le cumin et la coriandre et que ce sourire ne quitte jamais cette bouche.

Ma vie est bourrée de fautes d’orthographe, il me faut un correcteur, je veux que ce soit elle.

J’admire cette dignité avec laquelle ces femmes se battent au quotidien.

Messieurs les branleurs nous sommes des lâches qui s’ignorent et elles ont la décence d’éviter de nous le rappeler, elles ont la décence de nous aimer, elles ont la décence de nous élever.

Renaud disait dans Miss Maggie : « … ce n’est pas d’un cerveau féminin qu’est sorti la bombe atomique et pas une femme n’a sur les mains le sang des indiens d’Amérique… »

Le monde a besoin des femmes et chez nous peut-être plus encore.

Considérez ce papier comme une ode pour la femme et particulièrement pour la femme marocaine, en évitant de me vautrer dans « le misérabilisme victimaire » d’une femme marocaine constamment oppressée entre le poids de la société et du patriarcat, ça je le laisse pour Envoyé Spécial.

Et en lisant déjà certaines qui me diront, « mais moi je suis épanouie et libérée et articule aisément tradition et modernité dans ce Maroc en mutation » … Pffffffffffff !

Je parle de celles qui souffrent la tête haute dans l’indifférence totale.

Je parle de ces femmes mulets qui transportent à la sueur de leur front des paquets qui dépassent souvent leur propre taille du côté de Sebta.

Je parle de ces filles condamnées à épouser leur violeur. Une normalité déconcertante qui a poussé plus d’une à se donner la mort.

Je parle de l’injustice d’un système qui légifère sur base de préceptes religieux inégaux.

Moudawana mon cul ! La moudawana c’est comme une couverture mutuelle multi-risques, il n’y a que celles qui peuvent se la payer qui en bénéficient.

Je parle d’un poids qui écrase, qui froisse toutes expressions de féminité en l’accusant d’être l’œuvre du malin.

Je parle de ces femmes qui sont bonnes de mère en fille et qui restent des spectatrices du bonheur des autres.

Je ne supporte pas l’exploitation de l’homme par l’homme et encore moins de l’homme sur la femme.

Je veux dire mon profond respect aux prostituées, catins, putes, 9hab (pute en dialecte marocain), qui servent de soupapes dans des sociétés ou la frustration sexuelle est mère de tous les vices. Qui nous connaissent, nous les hommes, nous vendant leurs corps et plus encore.Leur humanisme, c’est un diamant brute.

Pardonne l’homme qui devient fou, il scie le matelas sur lequel il couche, se tire une balle plutôt que de prendre son pied. Il se cache à chaque montée d’émotion et se sent profondément seul dans sa carcasse.

Pardonnez ces fous de l’obscure, qui déshumanisent les Livres accusant le cuir chevelu, une poitrine ou un bout de cheville, d’invitation à la débauche.Cela ne peut-être obscène que dans les yeux d’un pervers.

Pardonnez-nous, ils ne savent pas ce qu’ils font.

Je reviens sur cette beauté, cette amazone des bas quartiers au coin de ma rue.

Elle aurait fait de moi un homme et elle aussi détriment de sa féminité, je le sais. Quand on aime dans le sud, on aime avec ses tripes, c’est puissant, ça peut faire mal.

Pourtant je ne lui ai plus jamais parlé, je me suis contenté de la regarder grandir.

Jusqu’au jour où j’ai assisté à son mariage du haut de mon balcon …

Elle a l’air heureuse et le con que je suis lui en veut.

Ce papier est une goutte d’eau dans l’océan de l’ingratitude des hommes.

 

 

« -Monseigneur est beau …

-Est-ce que vous pensez vraiment ce que vous dites.

-Bah, je flatte. »

Mais ça, ça sera pour une autre fois.

Étiquettes
Partagez

Commentaires